lundi 13 septembre 2010

Orgueil et godillots

Malgré ses finances fragiles, James Joyce menait grand train à Paris.

(J'admets que l'entrée en matière est un peu brutale).


Equilibriste du compte en banque, Joyce avait développé un talent exceptionnel de "quémandeur" (l'expression est de Lévy-Beaulieu) qui lui permit tout au long de sa vie de faire financer par d'autres le faste de son train de vie, contrepartie légitime selon lui pour ce qu'il considérait, avec raison, comme son génie.

Anecdote savoureuse. Je l'intitule : quand le funambule se prend les pieds dans le tapis.

Nous sommes donc à Paris. Joyce a envoyé un message larmoyant à son éditeur, Ezra Pound, se lamentant d'être trop pauvre pour s'acheter des chaussures. La suite, Victor Lévy-Beaulieu la raconte :

"Pour impressionner le monde avec lequel il mangeait, Joyce aimait qu'on lui apporte à sa table le courrier qu'il recevait. Un colis envoyé de Londres par Ezra Pound ne pouvait qu'être impressionnant et Joyce aimait bien jeter de la poudre aux yeux. Mais quand le colis fut ouvert et qu'il en tira les vieilles godasses de Pound [celui-ci avait envoyé de vieilles godasses usées qu'il ne portait plus], il fut consterné et demanda aussitôt à son fils Giorgio de les faire disparaître. Giorgio refusa, et les spectateurs médusés d'assister à une fulgurante engueulade en italien entre le père et le fils". (Victor Lévy-Beaulieu, "James Joyce, l'Irlande, le Québec, les mots", p. 677).

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