samedi 29 octobre 2011

Limonov d'Emmanuel Carrère

Merveilleux livre.
La vie d'un homme de lettres, qui se voit comme un homme de roman, qui se voit comme un Mishima (le chevalier exalté mais suicidaire d'un empire perdu), et un Hemingway (l'écrivain narcissique, plus grand que la vie, aux engagements mis en scène). L'histoire nous entraîne dans les banlieues grises des villes de province de l'URSS, dans l'underground artistique de Moscou sous Brejnev, dans les plaines d'Asie central, dans les maisons de milliardaires à New-York, dans la Serbie en guerre. L'occasion de revoir 40 ans d'histoire de la Russie. Voir aussi l'écrivain au travail, ses motivations, ses doutes.

Deux citations sur Limonov :

"Il se considère comme homosexuel, mais ne pratique guère, c'est plutôt un genre qu'il se donne" (p. 171)

"Il a toujours pensé que sa vocation c'est de s'enfoncer le plus profond possible dans la réalité" (p. 472)

Trois citations sur la Russie :

"Cette histoire d'opposition démocratique en Russie, c'est comme vouloir roquer quand on joue aux dames : un truc pas prévu par la règle du jeu" (p. 26)

"Motritch n'a rien publié et ne publiera jamais rien, mais l'avantage de la censure, c'est qu'on peut être un auteur qui ne publie rien sans qu'on vous soupçonne de manquer de talent, au contraire" (p. 79)

"Après la disgrâce et l'exécution de Beria, chef du NKVD sous Staline, les souscripteurs de la Grande encyclopédie soviétique, ont reçu l'instruction de découper dans leur exemplaire l'article louangeur consacré à cet ardent ami du prolétariat pour le remplacer par un article de calibre identique sous le détroit de Behring" (p. 242)

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